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Enfants et écrans : quel impact sur leur développement cognitif ?

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Tablettes, smartphones, télévision, ordinateurs… Les écrans se sont installés dans le quotidien des enfants dès le plus jeune âge. Que ce soit à la maison, à l’école ou chez la nounou, ils captent leur attention, parfois plusieurs heures par jour. 

Face à cette omniprésence, une question légitime se pose : quel impact les écrans ont-ils réellement sur le développement cognitif des enfants ? Sont-ils des alliés pour apprendre autrement, ou au contraire, un frein à leur épanouissement intellectuel, émotionnel et social ? Parents, enseignants et professionnels de santé sont de plus en plus nombreux à s’en inquiéter. 

Cet article propose de faire le point sur ce que l’on sait aujourd’hui des effets des écrans : quels bénéfices peut-on en tirer, à quelles conditions ? Quels sont les risques d’un usage excessif ou inadapté ? Et surtout, comment accompagner son enfant pour qu’il grandisse sereinement dans un monde où les écrans sont partout ?

I. Comprendre le développement cognitif de l’enfant

Le développement cognitif désigne l’ensemble des capacités mentales qui permettent à l’enfant de penser, apprendre, comprendre et s’adapter à son environnement. Il englobe notamment la mémoire, le langage, l’attention, le raisonnement ou encore les fonctions exécutives (planification, contrôle des impulsions, flexibilité mentale) [1].

Un enfant joue avec des  blocs en bois dans un salon. Sa mère est attentive.

Les premières années de vie sont déterminantes : entre 0 et 6 ans, le cerveau se développe à une vitesse fulgurante [2]. Cette période sensible est marquée par des apprentissages fondamentaux, qui se poursuivent activement jusqu’à 12 ans. Chaque étape — de l’exploration sensorielle du nourrisson aux raisonnements plus complexes de l’enfant scolarisé — prépare le terrain aux compétences futures.

Ce développement repose avant tout sur la richesse des expériences vécues : interactions humaines bienveillantes, jeux libres, manipulation d’objets, activité physique… [3]. Autant de stimulations variées qui façonnent la construction du cerveau bien plus efficacement que les sollicitations virtuelles seules.

II. Enfants et écrans : quels bénéfices quand l’usage est raisonné ?

1. Des applications éducatives qui stimulent l’apprentissage

De nombreuses applications bien conçues peuvent accompagner l’enfant dans ses premiers apprentissages : lettres, chiffres, formes, couleurs, ou encore initiation aux langues étrangères. Grâce à des interfaces intuitives, ces outils captent l’attention tout en stimulant la mémoire, la logique et la concentration [4]. Les activités sont souvent conçues de manière progressive, ce qui permet à l’enfant de développer ses compétences à son rythme.

2. Jeux vidéo : coordination, mémoire et résolution de problèmes

Certains jeux vidéo, choisis avec discernement, peuvent avoir un impact positif sur le développement cognitif [5]. Jeux de construction, casse-têtes, aventures interactives ou jeux de logique renforcent la coordination œil-main, la résolution de problèmes, la planification ou encore la mémoire de travail. Ils peuvent également développer la patience et l’autonomie, notamment lorsque l’enfant est amené à réfléchir par lui-même pour progresser.

3. Un accès élargi à la culture et à l’information

Les écrans offrent aussi un accès privilégié à une vaste palette de contenus culturels et éducatifs : documentaires, dessins animés intelligents, visites virtuelles, podcasts pour enfants, etc. Utilisés à bon escient, ces supports enrichissent la curiosité naturelle de l’enfant, stimulent son vocabulaire et l’ouvrent sur le monde.

4. Ce que disent les études

Selon une étude parue dans Frontiers in Psychology (2017), l’usage modéré de tablettes éducatives, accompagné par un adulte, peut améliorer les compétences langagières chez les enfants en bas âge. Ce bénéfice est d’autant plus marqué lorsque l’écran est utilisé de manière interactive, dans un contexte bienveillant et structuré [6].

👉 Les écrans ne sont donc pas à bannir, mais à encadrer intelligemment pour qu’ils deviennent de véritables outils pédagogiques au service du développement de l’enfant.

III. Enfants et écrans : les risques d’un usage excessif ou mal adapté

Si certains usages des écrans peuvent être bénéfiques, un usage excessif, inadapté ou non accompagné présente de réels risques pour le développement de l’enfant.

1. Des troubles de l’attention et une fatigue cognitive accrue

Une exposition prolongée aux écrans, en particulier sans pauses régulières, peut entraîner des troubles de l’attention chez l’enfant [7]. Ces derniers peinent alors à se concentrer sur une tâche, passent d’un contenu à un autre sans réelle continuité, et développent une impatience cognitive. À long terme, cela peut affecter leur capacité à se concentrer en classe ou à mener à bien des apprentissages complexes. Une fatigue cognitive peut également apparaître, marquée par une baisse de vigilance, d’irritabilité et des difficultés à mémoriser.

2. Un déséquilibre dans les activités fondamentales au développement

Le temps passé devant les écrans empiète souvent sur d’autres activités essentielles à la croissance des enfants : le sommeil, les échanges avec les adultes et les pairs, les jeux libres et les activités motrices. Or, ces temps sont irremplaçables dans la construction des compétences sociales, émotionnelles et physiques. Une carence dans ces domaines peut freiner l’apprentissage du langage, la régulation des émotions ou encore la conscience corporelle [8].

3. Des retards de langage et une baisse de l’empathie

Enfants et écrans : un jeune garçon se bouche les oreilles et feint de ne pas entendre son père.

Les enfants exposés très tôt et de manière passive aux écrans (télévision, vidéos YouTube, etc.), en particulier avant l’âge de 3 ans, présentent un risque accru de retard de langage. Les interactions humaines – notamment les échanges verbaux avec les adultes – sont essentielles dans cette période sensible [9]. Par ailleurs, la multiplication de contenus violents ou rapides peut engendrer une forme de désensibilisation émotionnelle et altérer la capacité d’un enfant à développer son empathie [10].

4. Des recommandations officielles claires

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une absence totale d’écrans avant 2 ans et un usage très limité jusqu’à 5 ans [11]. Les pédiatres et neuroscientifiques insistent sur l’importance de privilégier les activités interactives (jeux, discussions, lectures) aux contenus passifs. De nombreuses études confirment que la qualité de l’environnement humain et relationnel reste le pilier d’un bon développement cognitif chez l’enfant.

💡 Bon à savoir : un environnement riche en échanges verbaux et émotionnels soutient activement le développement du cerveau chez l’enfant. Et si vous ne parvenez pas à discuter avec vos enfants, découvrez nos conseils pour améliorer la communication parent-enfant dans cet article 👉 Une communication efficace entre parents et enfants : stratégies et conseils.

IV. Ce qui change tout : contenu, durée et accompagnement

Quand on parle d’écrans, il est essentiel de comprendre que tout dépend du comment. Le contenu, la durée d’exposition et surtout l’accompagnement parental transforment totalement l’impact des écrans sur le développement de l’enfant.

1. Tous les écrans ne se valent pas

Une vidéo YouTube lancée en boucle sans supervision n’a rien à voir avec une application éducative interactive bien choisie. Si vous devez occuper votre enfant pendant que vous préparez le dîner, par exemple, certaines applis peuvent réellement l’aider à apprendre tout en s’amusant. Par exemple, Bayam (créée par Bayard Jeunesse) propose des contenus interactifs adaptés à l’âge de l’enfant : histoires, activités créatives, découvertes du monde… Autre appli utile : EduMedia, qui propose des animations scientifiques ludiques pour les plus grands (à partir de 6-7 ans).

Côté chaînes YouTube francophones, vous pouvez vous tourner vers Comptines et chansons de Titounis (pour les tout-petits), ou C’est pas sorcier et 1 jour, 1 question pour les enfants plus grands. 

Ces contenus sont validés par des professionnels de l’éducation, et permettent d’apprendre tout en restant concentré ✅.

2. L’âge de l’enfant compte énormément

Des enfants regardent un dessin animé dans un tipi aménagé à l'extérieur.

Plus l’enfant est jeune, plus son cerveau est malléable et sensible. Avant 2 ans, les recommandations officielles sont très claires : pas d’écrans, ou seulement avec un adulte, pour des usages ponctuels. De 2 à 6 ans, on peut introduire des contenus courts et bien choisis, à raison de 20 à 30 minutes par jour maximum.

3. La présence de l’adulte change tout

Ce qu’on appelle le co-visionnage ou la co-interaction, c’est le fait d’être présent avec l’enfant pendant l’usage des écrans, de commenter, expliquer, réagir. Cela permet à l’enfant de mieux comprendre ce qu’il voit, d’en tirer un réel bénéfice, et de rester connecté à son environnement humain [12].

💡 Bon à savoir : mieux vaut 15 minutes d’écran intelligent accompagné qu’une heure de vidéos passives et répétitives.

V. Recommandations concrètes aux parents

Face à la place grandissante des écrans dans le quotidien, les parents ont un rôle clé à jouer pour encadrer leur usage. Les grandes instances comme l’OMS ou l’ANSES sont unanimes : tout commence par l’âge de l’enfant.

Avant 3 ans, mieux vaut éviter les écrans autant que possible, surtout s’ils sont passifs (TV, vidéos non interactives). L’enfant a besoin d’expériences sensorielles, motrices et humaines. Quelques minutes occasionnelles, en présence d’un adulte, peuvent être tolérées, mais ne doivent pas devenir une habitude. 

Entre 3 et 7 ans, un usage très limité est recommandé : environ 30 minutes, sur des contenus adaptés et de qualité, toujours accompagnés par un adulte. Entre 7 et 12 ans, on peut aller jusqu’à 1h par jour, en conservant une vigilance sur le type de contenus et le respect du temps d’écran. Entre 12 et 15 ans, la limite idéale se situe à 1h30 par jour [13].

💡 Bon à savoir : au-delà du temps, la priorité reste la qualité des interactions hors écrans : jeux libres, lecture, activités physiques, échanges familiaux. Pour aller plus loin, découvrez pourquoi le jeu est essentiel à chaque étape de leur développement 👉 L’importance du jeu dans le développement des enfants.

Enfin, les enfants suivent ce que vous faites plus que ce que vous dites : donnez l’exemple, instaurez des moments sans écrans (repas, coucher…), et proposez un cadre clair avec des horaires définis. C’est cette cohérence éducative qui fait toute la différence.

En effet, une étude a prouvé que le temps d’écran que les parents et les enfants regardent est étroitement lié. Les enfants qui vivent dans des foyers où regarder la télévision est encouragé (par exemple, les repas pris devant la télévision et la télévision allumée lorsque l’enfant rentre de l’école) sont plus susceptibles de se lancer eux-mêmes dans le binge-watching. Si les parents regardent la télévision plus de quatre heures par jour, leurs fils et leurs filles auront, respectivement, 10,5 fois et 3 fois plus de chances de faire de même [13].

Conclusion

Les écrans font désormais partie intégrante de la vie familiale. Utilisés avec discernement, ils peuvent devenir un outil d’apprentissage stimulant. Mais sans cadre ni accompagnement, ils risquent de nuire au développement cognitif, émotionnel et social des enfants. L’enjeu est donc de trouver un juste équilibre : les écrans doivent enrichir les découvertes de l’enfant, sans jamais remplacer les moments de jeu, de lecture ou de partage en famille. 👉 Pour aller plus loin, découvrez Comment établir des routines saines pour les enfants : conseils pour les parents.

Bibliographie

Voir les références scientifiques

  1. Diamond A. Executive functions. Annu Rev Psychol. 2013;64:135-68. doi: 10.1146/annurev-psych-113011-143750. Epub 2012 Sep 27. PMID: 23020641; PMCID: PMC4084861.
  2. Brown TT, Jernigan TL. Brain development during the preschool years. Neuropsychol Rev. 2012 Dec;22(4):313-33. doi: 10.1007/s11065-012-9214-1. Epub 2012 Sep 25. PMID: 23007644; PMCID: PMC3511633.
  3. Bjorklund DF, Brown RD. Physical play and cognitive development: integrating activity, cognition, and education. Child Dev. 1998;69(3):604-606.
  4. Tas, Nurullah & Bolat, Yusuf & Publication, Istes. (2023). Digital Games and Gamification in Education.
  5. B Chaarani, et al. Association of video gaming with cognitive performance among children(link is external). JAMA Open Network. DOI: 10.1001/jamanetworkopen.2022.35721 (2022).
  6. Chmiliar L. Improving Learning Outcomes: The iPad and Preschool Children with Disabilities. Front Psychol. 2017;8:660. Published 2017 May 5. doi:10.3389/fpsyg.2017.00660
  7. Muppalla SK, Vuppalapati S, Reddy Pulliahgaru A, Sreenivasulu H. Effects of Excessive Screen Time on Child Development: An Updated Review and Strategies for Management. Cureus. 2023 Jun 18;15(6):e40608. doi: 10.7759/cureus.40608. PMID: 37476119; PMCID: PMC10353947.
  8. Canadian Paediatric Society, Digital Health Task Force, Ottawa, Ontario. Screen time and young children: Promoting health and development in a digital world. Paediatr Child Health. 2017 Nov;22(8):461-477. doi: 10.1093/pch/pxx123. Epub 2017 Oct 9. Erratum in: Paediatr Child Health. 2018 Feb;23(1):83. doi: 10.1093/pch/pxx197. PMID: 29601064; PMCID: PMC5823000.
  9. Karani NF, Sher J, Mophosho M. The influence of screen time on children’s language development: A scoping review. S Afr J Commun Disord. 2022 Feb 9;69(1):e1-e7. doi: 10.4102/sajcd.v69i1.825. PMID: 35144436; PMCID: PMC8905397
  10. Miedzobrodzka E, van Hooff JC, Krabbendam L, Konijn EA. Desensitized gamers? Violent video game exposure and empathy for pain in adolescents – an ERP study. Soc Neurosci. 2023 Dec;18(6):365-381. doi: 10.1080/17470919.2023.2284999. Epub 2023 Dec 6. PMID: 37990996; PMCID: PMC10721224.
  11. Veldman SLC, Altenburg TM, Chinapaw MJM, Gubbels JS. Correlates of screen time in the early years (0-5 years): A systematic review. Prev Med Rep. 2023 Apr 19;33:102214. doi: 10.1016/j.pmedr.2023.102214. PMID: 37223568; PMCID: PMC10201873.
  12. Strouse GA, Troseth GL, O’Doherty KD, Saylor MM. Co-viewing supports toddlers’ word learning from contingent and noncontingent video. J Exp Child Psychol. 2018 Feb;166:310-326. doi: 10.1016/j.jecp.2017.09.005. PMID: 28992611; PMCID: PMC5777334.
  13. Muppalla SK, Vuppalapati S, Reddy Pulliahgaru A, Sreenivasulu H. Effects of Excessive Screen Time on Child Development: An Updated Review and Strategies for Management. Cureus. 2023 Jun 18;15(6):e40608. doi: 10.7759/cureus.40608. PMID: 37476119; PMCID: PMC10353947. 

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Marlène Barthelme

une photo de moi, Marlène, une jeune femme aux longs cheveux châtains

Fondatrice et responsable éditoriale de Famtastique. Après plusieurs années dans le monde de la santé naturelle, je décide de venir en aide aux familles de façon plus générale ✨